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Biais de justification du choix

« J’exagère les avantages d’une option après l’avoir choisie. »

Définition

Le biais de justification du choix est la tendance à surestimer rétrospectivement les points positifs d’une option après l’avoir choisie. Cela implique aussi de sous-estimer les aspects négatifs de ce choix. Plusieurs études montrent que la mémoire est impliquée dans ce biais, puisque notre souvenir des différentes options est modifié, de sorte que nous nous rappelons davantage des points positifs de l’option choisie [1]. Dans le même ordre d’idées, nous avons aussi tendance à oublier ou à minimiser ses points négatifs. Le souvenir des options rejetées est aussi modifié, puisque nous nous rappelons surtout de leurs aspects négatifs et moins de leurs aspects positifs. Cela nous donne l’illusion d’un plus grand écart entre notre choix et les autres alternatives qui s’offraient à nous. Des études ont montré que des gens manipulés à croire qu’ils avaient choisi une option, alors qu’ils l’avaient en réalité rejetée, ont aussi tendance à se souvenir plus positivement de cette option [2]. Ainsi, nous expérimentons le biais de justification du choix même lorsque nous n’avons que l’illusion d’avoir choisi une option.

Exemple

Dans le cadre d’une étude, des chercheurs ont demandé à des jeunes finissant-es en comptabilité d’évaluer différentes firmes selon leurs points positifs et négatifs. Puis ils ont répété cette mesure un an après qu’ils et elles aient été embauché-es dans une firme particulière. Leur attitude était devenue significativement plus positive envers la firme dans laquelle ils et elles avaient choisi de travailler, et leur évaluation des autres firmes était devenue significativement plus négative [3].

Explication

Lorsque nous sentons que le choix que nous avons fait n’était finalement pas le meilleur, nous sommes déçu-es, honteux-ses, ou anxieux-ses. Notre choix n’est pas en cohérence avec nos attitudes (penser que c’était le bon choix), ce qui cause la dissonance post-décisionnelle. Selon la théorie de la dissonance cognitive, nous ressentons une tension interne lorsque nos attitudes, croyances, actions, choix ou émotions sont en contradiction entre elles. Nous avons tendance à adopter des stratégies pour réduire cette dissonance et retrouver un sentiment de cohérence interne [4]. Ainsi, la dissonance post-décisionnelle est une forme particulière de dissonance cognitive. C’est pour diminuer la dissonance cognitive que le biais de justification du choix entre en compte. De manière souvent involontaire, nous allons modifier nos souvenirs, en accentuant les avantages de notre choix, et en minimisant ceux des options refusées. Ce faisant, nous retrouvons un sentiment de cohérence interne, puisque nous sentons que notre action est cohérente avec notre croyance d’avoir choisi la meilleure option.

Conséquences

Le biais de justification du choix peut avoir comme effet l’augmentation de la polarisation de nos attitudes. En surévaluant l’écart entre notre choix et les autres possibilités, nous avons une opinion beaucoup moins nuancée à propos des différentes alternatives qui s’offraient à nous. Une étude a démontré qu’après avoir voté aux élections présidentielles aux États-Unis, les citoyens ont tendance à évaluer encore plus positivement le parti pour lequel ils ont voté [5]. Ce biais peut donc avoir un impact sur la polarisation des idées politiques, sociales et culturelles.

Pistes de réflexion pour agir à la lumière de ce biais

  • Dresser une liste des avantages et inconvénients de chacune des options, avant de faire un choix. Ainsi, même après avoir choisi une option, nous conserverons une description objective de chaque alternative.

  • Considérer les arguments de personnes ayant fait un choix différent du nôtre peut aider à nuancer notre vision et à voir les avantages des autres options.

  • Conserver une certaine humilité et rester flexible dans nos attitudes. En acceptant qu’il soit possible que nous nous trompions, nous gardons en tête la possibilité de modifier nos attitudes au fil du temps.

Comment mesure-t-on ce biais?

Généralement, ce biais est mesuré par une expérimentation en trois étapes. La première étape est de présenter différentes options aux participant-es, sans leur dire qu’ils et elles devront en choisir une. On leur demande d’estimer la désirabilité de chaque option, sur une échelle, par exemple allant de 1 à 8. La deuxième étape consiste à demander aux participant-es de choisir une des options. Finalement, on redemande aux participant-es d’évaluer encore une fois les différentes options, et on mesure la différence entre leur première et deuxième évaluation sur l’échelle de 1 à 8. En règle générale, les participant-es évaluent de manière significativement plus élevée une option après l’avoir choisie, et ils et elles évaluent moins positivement les options rejetées.

Ce biais est discuté dans la littérature scientifique :

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Ce biais a des répercussions au niveau individuel ou social :

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Ce biais est démontré scientifiquement :

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Références

[1] Lind, Martina, Mimi Visentini, Timo Mäntylä & Fabio Del Missier (2017). Choice-supportive misremembering: a new taxonomy and review. Frontiers in Psychology, 8, 2062–2062. https://doi.org/10.3389/fpsyg.2017.02062


[2] Henkel, Linda. A. & Mara Mather (2007). Memory attributions for choices: how beliefs shape our memories. Journal of Memory and Language, 57(2), 163–176. https://doi.org/10.1016/j.jml.2006.08.012


[3] Lawler, Edward, Walter J. Kuleck, John Grant Rhode & James E. Sorensen. (1975). Job choice and post decision dissonance. Organizational Behavior & Human Performance, 13(1), 133–145. https://doi-org.proxy.bibliotheques.uqam.ca/10.1016/0030-5073(75)90009-4


[4] Fointiat, Valérie, Fabien Girandola & Patrick Gosling (2013). La dissonance cognitive: Quand les actes changent les idées. Paris: Armand Colin. https://doi-org.proxy.bibliotheques.uqam.ca/10.3917/arco.gosli.2013.01


[5] Beasley, Ryan K. & Mark R. Joslyn (2001). Cognitive dissonance and post-decision attitude change in six presidential elections. Political Psychology, 22(3), 521–540.

Tags

Niveau individuel, Heuristique de disponibilité, Besoin de consonance cognitive

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Auteur-e

Anne-Sophie Blouin, étudiante au baccalauréat en psychologie à l’Université du Québec à Montréal

Comment citer cette entrée

Blouin, A.-S. (2020). Biais de justification du choix. Dans C. Gratton, E. Gagnon-St-Pierre, & E. Muszynski (Eds). Raccourcis : Guide pratique des biais cognitifs Vol. 1. En ligne : www.shortcogs.com

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